Voici un bref etat des lieux. La première société minière de la Guinée s’appelle LA SOCIÉTÉ DES BAUXITES DU MIDI, une société française qui a commencé en 1945. Elle n’a laissé que les ruines à Tamara et dans la Banlieue de Conakry, notamment aux quartiers Concasseur et Minière.
La deuxième société minière PECHINEY à Fria qui a ouvert en 1959, est la seule et la première en Afrique qui a transformé la bauxite en Alumine sur place. Elle a en outre bâti une ville et amélioré les conditions de vie de ses travailleurs et des populations Guinéennes. Elle a eu le mérite d’ouvrir un centre de formation technique performant et bâtir le meilleur hôpital du pays en son temps. Bref, PECHINEY est la société minière la plus méritante de l’histoire de la Guinée.
La CBG (Compagnie des Bauxites de Guinee) est la troisième société minière, la plus grande de toutes.
Si elle a eu le mérite de créer de nombreux emplois et de transformer Kamsar, en 60 ans d’exploitation elle n’a pas daigné penser à la transformation de la bauxite en alumine.
OBK (Office des Bauxites de Kindia), devenu SBK (Societe des Bauxites de Kindia) puis RUSAL, a commencé en 1973. Comme la CBG, la transformation n’a jamais été sa préoccupation. Même quand RUSAL a repris l’usine d’alumine de Fria, il n’a pas été prévu d’y orienter la bauxite brute de Kindia, pourtant si proche. Des milliers de tonnes de bauxite traversent la ville de Conakry tous les jours pour le port.
À partir des années 2000, les Chinois se sont lancés comme des fourmis dans la production de la bauxite de la manière la plus décriée. Visiblement, la Guinée est devenue une destination pour les destructeurs de la nature, avec la naïveté et la complicité des cadres et des gouvernants. Je me réjouis de la sortie du Président de la Transition sur le ton qui sied et qui exprime la volonté des Guinéens.
La production de la bauxite de la Guinée n’a jamais eu de retombées sur notre agriculture et le mode de vie des Guinéens. Elle a simplement permis au pays de disposer de devises pour les besoins d’importations des produits de consommation, au lieu de financer le développement agro-industriel en particulier.
Malheureusement, la durée de la Transition ne pourra pas permettre de suivre la mise en œuvre de cette volonté patriotique. Toutefois, le Colonel a touché du doigt un sujet fondamental dont la mise en œuvre devra absolument être le programme prioritaire de toutes les gouvernances futures.
SUGGESTIONS.
Si le Président de la Transition tient à cœur ce qu’il vient de dire aux miniers, je pense qu’il y a un préalable auquel le Gouvernement guinéen doit s’atteler dès maintenant : la formation des jeunes Guinéens aux métiers techniques, pour préparer des ouvriers qualifiés aptes à répondre aux compétences futures des usines de transformation. Force est de reconnaître que nous n’avons pas une classe ouvrière digne de ce nom.
Notre système éducatif souffre d’insuffisances notoires qui détournent notre jeunesse des nobles métiers développement d’un pays :
》Les filières techniques (phase préparatoire à la formation des ouvriers qualifiés, des aide-ingenieurs et des ingénieurs) ont disparu dans nos collèges et lycées.
》Les centres d’apprentissage qui devraient absorber les jeunes non scolarisés, sont inexistants.
》98% de nos universités ne forment que les filières littéraires et financières ou presque ; rien que les filières de climatiseurs et de discussions souvent stériles.
Le système éducatif Guinéen a fait dos à la formation des bâtisseurs de la Guinée.
Comment allons-nous faire avec notre jeunesse, lorsque les sociétés minières auront ouvert des usines de transformation qui exigent une main d’œuvre de qualité ?
Toute unité industrielle a besoin au moins de 80% de techniciens dans son effectif.
QUE FAUT-IL FAIRE DANS L’IMMÉDIAT ?
1) Doter le Ministère de l’enseignement technique et de la formation professionnelle d’un budget à la mesure de notre ambition, en vue de préparer des jeunes ouvriers et techniciens Guinéens répondant aux critères professionnels et aux standards internationaux.
2) Créer de vraies écoles professionnelles pour les métiers de technologies industrielles, de mécanique, d’électro-mécanique, d’électronique, de machinisme, de maçonnerie, de chaudronnerie, de construction métallique, de menuiserie, d’électricité, de plomberie et les autres métiers agro-pasroraux et urbains.
Pour la qualité de la formation, ces écoles devront être à régime d’internat dans un premier temps. Elles devront être pilotées ou affiliées aux écoles similaires de grande réputation d’Europe ou du Maghreb qui aideront à transmettre leurs expertises. Certaines d’entre elles pourraient avoir un statut mixte, avec la participation des sociétés minières concernées.
Introduire les filières techniques dans l’enseignement secondaire, comme cela se faisait dans les années 60 et 70.
MISE EN GARDE
Si nous ne prévoyons pas ce qui précède, les nouvelles industries minières ne recruteront que les ouvriers des pays voisins, sous le regard de notre jeunesse ahurie. Ça sera la source d’une autre crise entre une main d’œuvre locale inexistante ou incompétente et les sociétés minières en quête perpétuelle de performances et de résultats. Une autre condition constitue un préalable important : l’énergie. C’est le secteur où l’ancien Président Alpha Condé a véritablement réussi mieux que tous ses prédécesseurs.
Nous devons poursuivre cet elan par la construction de nouveaux barrages hydro-électriques en prévision des usines de transformation de la bauxite dans notre pays. L’énergie est indispensable à pour l’implantation et la pérennisation des industries minières. Notre capacité actuelle est nettement insuffisante par rapport à notre rêve d’industrialisation du secteur minier.
Il serait conseillé que le Président de la Transition soumette cette noble volonté au CNT pour en faire une Loi en vue d’obliger les gouvernances futures à s’inscrire dans cette logique dans la perspective de l’émergence de la Guinée.
Il EST TEMPS DE NOUS IMPOSER CETTE EXIGENCE. SOYONS CONSCIENTS DE NOS INSUFFISANCES. SOYONS EXIGEANTS SUR NOUS-MÊMES, SI NOUS VOULONS RELEVER NOS DÉFIS.
Ensemble, réfléchissons pour l’émergence de notre pays.
Ibrahima Jair KEITA pour GCO