Cette phrase, « Le peuple veut connaitre… », est, sans nul doute, la phrase la plus célèbre puisque la plus usitée dans ce procès. Il veut connaitre quoi, le peuple ? LA vérité. Pas une vérité donc. La connaîtra-t-elle LA vérité lorsqu’il y a, en face de nous, un chapelet de vérités individuelles, une juxtaposition des « une/sa… vérité ».
Autant de « vérités » que d’inculpés ! Je me tourne alors du côté de la Cour. Découverte et mise sur l’espace publique, LA vérité de la Cour ne sera, aux yeux d’une frange importante du peuple, qu’UNE vérité. Celle des anti inculpés.
La raison? Elle est cachée, entre autres, dans la langue de travail, de communication de la Cour. Tout commence, se déroule, et finit en langue française. Or, secret de polichinelle, cette belle langue n’est parlée, écrite « correctement » que par une petite couche du peuple qui doit connaitre. Celui-ci entend les « une vérité » à travers les « traductions » émaillées forcément de subjectivités de ses interpretes occasionnels. Ces derniers étant, forcément, des acteurs-parties, donc ou pro ou anti.
L’usage d’une seule langue (étrangère de surcroît) prive le peuple qui veut connaitre d’un de ses droits, celui de se faire son opinion personnelle, propre. J’ai eu cette conversation avec une dame venue nous rendre visite à notre domicile.
« Suivez vous le procès, madame? ». Sa réponse :« Nous sommes les oubliés. Tout se dit en toubabou kan, fortee koui ». Sa réponse sera celle de plusieurs de nos compatriotes si jamais l’on faisait un sondage. Une question à laquelle je m’attends est celle-ci : quelles langues choisir parmi nos nombreuses langues, étant donné que l’on parle de 20 et de 08 « plus » parlées? Mis à contribution, bien avant le démarrage du procès, le Service National d’Alphabétisation et nos linguiste auraient pû trouver LA solution idoine. En réponse à la question suscitée, moi j’ai ma solution. La voici : le 19 décembre 2022, j’ai répondu, dans Facebook, à une question sensée. En ces termes : « Je ne suis pas linguiste. Mais je crois savoir que la seule langue guinéenne qui n’est pas parlée en dehors du territoire national, donc parlée en Guinée seulement (???), est le SOSSOE KHOUI. Je vote, et faites comme moi por favor, pour cette langue. » Du reste belle et à la portée de toutes et de tous. Elle est la langue de la capitale, une zone cosmopolite, dans laquelle vivent les « échantillons » des 22 ethnies de la belle Guinée.
Enfants, ici même à Conakry, étaient traités de « sauvages » ceux qui, parmi nous, ne parlaient pas soussou. Ils étaient, d’office, exclus de la bande. Et lorsque nous voulions séduire les filles karerakas fraîchement débarquées à Conakry, nous parlions, devant elles, la langue de Fode Conte. On peut dire à Conakry : « Je ne sais pas parler soussou », mais on ne peut pas dire : « Je ne comprends pas soussou ». Nos soldats qui jouaient au ballon, la fois dernière, parlaient en soussou. Le président Ahmed Sekou Toure adorait la langue soussou. Lansana Conte en faisait un excellent usage. Courroucé, il l’exprimait en soussou. Dadis est, linguistiquement parlant, un soussou. Sekouba konate en a fait sa langue maternelle. Il a même épousé le gestuel soussou. Alpha Conde est un excellent parleur de la langue. Sydia Toure, Lansana Kouyate sont à l’aise dans son usage. Etc.
Dans l’optique de démocratiser les messages des acteurs-parties du procès, on aurait dû privilégier l’aspect « investissement » au détriment de l’aspect « coût » du procès. Dit autrement, le procès doit être vu comme un investissement et non comme un coût. Tout bon investissement crée le retour sur investissement. Ce retour, dans le cas présent, est d’ordre EDUCATIF.
Pourquoi n’a t’on pas créé un pool d’interprètes (en soussou uniquement) à l’instar du procès des gangs animé, en son temps, par mon défunt ami Doura Cherif?
L’effet domino aidant, chaque échantillon aurait interprété pour ses membres. Et la salle d’audience, si belle, aurait toujours fait le plein-plein-plein.
Facely 2 Mara, journaliste.
( A SUIVRE…)