Calixte Beyala s’est exprimé sur le tribalisme. La romancière de 58 ans a partagé son expérience de victime du tribalisme sur les réseaux sociaux. Elle est également revenue sur l’origine de ce fléau qui effrite sérieusement l’unité nationale au fil des années.
«J’ai vécu la chose dans ma chair profondément, moi qui suis plutôt universaliste. On m’a traitée de tous les noms. A partir de mon patronyme, on m’a mise dans une case, on m’y a enfermée, on m’a insultée. On a dit que je suis béti, donc que forcément, j’étais une sardinarde. Que j’étais une voleuse, que je n’avais pas une vie structurée de femme. On n’a pas respecté mes enfants, ni mes petits-enfants. C’est quelque chose qui met à mal la nation, c’est quelque chose qui disloque l’idée de la nation, ça l’effrite, ça la tue», a déploré l’Écrivaine à l’occasion de la fête de l’unité nationale, célébrée ce mercredi 20 mai 2020 au Cameroun.
C’est dans un entretien avec CRTVweb, qu’elle dit avoir été elle-même victime de cette haine tribale, sans en comprendre les motivations de ses pourfendeurs. On lui aurait prêté des accointances avec le régime, allant jusqu’à lui subodorer un poste ministériel.
«Ceux qui dirigent ce pays appartiennent à toutes les tribus. Ils appartiennent à toutes les cultures, à toutes les langues, à toutes les religions. Ce n’est pas une question de bamileké, de bassa, de duala, d’ewondo, d’eton… ce sont les mêmes qui dirigent (…) il n’y a pas un groupe qui profite du pouvoir dans ce pays plus qu’un autre. Nous sommes tous logés à la même enseigne!», a-t-elle décrié regrettant que l’élite dirigeante soit stigmatisée et accusée d’appartenir à une seule ethnie.
Pour Calixte Beyala, ce phénomène n’est pas le fait du hasard. Et D’après elle, il est une fabrication des politiques qui instrumentalisent les jeunes à des fins pouvoiristes.
«C’est un discours préparé par des hommes politiques ambitieux, qui estiment que c’est leur tour de prendre le pouvoir, et qui ont finalement manipulé les peuples avec ces discours de haine. Ce n’est pas né de la jeunesse. A l’analyse, il est apparu que les personnes qui entretenaient la haine et la stigmatisait sur la toile, étaient plus ou moins proches de certains partis politiques. Ils ont développé la notion de *chassement*. Quand on parle de *chassement*, pour nous qui sommes des intellectuels, ça veut dire génocide. Ça ne veut pas dire chasser quelqu’un du pouvoir. C’est un discours presque de nazillon, qui s’est tenu sur les réseaux sociaux pendant des années, et qui a pris son ampleur au moment des élections de 2018. J’ai suivi ça de près. Je ne disais rien. Je voulais en tant qu’intellectuelle voir jusqu’où ça va aller. Quand après on a eu la conjonction entre ces élites intellectuelles qui tenaient ces discours de *chassement*, et certains partis politiques au pays, on a vu qu’il y avait une coordination, une conjonction de pensées, un même mouvement vers quelque chose.», a expliqué la romancière.
La littéraire espère cependant que le Cameroun sera au dessus de tout ceci. «On a compris que c’était un projet qui fait énormément mal à l’unité nationale. Le Cameroun va rester un et indivisible, et nous allons devoir, soit vivre ensemble, soit tous mourir ensemble. Nous sommes embarqués dans le même bateau», dixit Calixte Beyala.
Source : ActuCameroun
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