La mort, comme une foudre, vient encore de frapper la 15è promotion (1984-1987) du Centre d’Etudes des Sciences et Techniques de l’Information (CESTI) de l’Université Cheickh Anta Diop de Dakar.

Est-ce que je rêvais, ce mercredi matin vers 08heures, quand mon confrère, Mamadou Ciré Savané de «Mediaguinee», m’a appelé pour m’annoncer le décès de mon grand frère et promotionnaire, Fassiri Camara, ancien Directeur Général du Quotidien National «Horoya»?

Doyen, je te savais malade depuis belle lurette, mais je ne m’imaginais pas que tu allais nous quitter sur la pointe des pieds. Sans crier gare. Nos condisciples, notamment ceux de Dakar, que j’ai pu informer, pensaient à un canular, alors que tu nous a réellement devancés dans le royaume du silence.

Tu viens de grossir les rangs après les voyages sans retour des Sénégalais Rokhaya «Daba» Sarr, Mamadou Aby Camara, «le philosophe», Moustapha Diop «le benjamin», tous morts à la fleur de l’âge, du Burkinabé Zézouma Millogo «Karaté bar», du Tchadien Faradj Moulay «j’ai une question à deux volets».

Je me rappelle encore de ce jour poussiéreux d’octobre 1984 lors de notre première rencontre dans la cour du CESTI pour les formalités d’inscription avant notre retrait, pour nous désaltérer, à «la Case Foyer » où je vois encore ta belle silhouette et tes rires moqueurs.

Tu as abandonné dans ta course folle et douloureuse tes trois complices, Boubacar Bah «Mao», plus vieillissant que toi, mais toujours en poste au Conseil National de la Communication (CNC), Hadja Saran Touré au ministère des Postes et Télécommunications et Mamadouba Soumah à la RTG.

Je ne pense pas si je serais le seul à te garder longtemps encore dans mon cœur. Ta plume alerte a fait les beaux jours du journal école de notre promotion. Notre professeur de «Collecte et traitement de l’information», la défunte Geneviève Antonelli, ancienne de Paris Match et de France Culture, avait dit publiquement de toi que tu étais «un excellent journaliste».

Tu avais mérité ces remarques quand elle nous avait demandé de «couvrir» -notre premier article école- à la Case Foyer la conférence d’Albert Bourgi, ancien éditorialiste à «Jeune Afrique», sur la Palestine. Ton compte-rendu était passé dans les mains de tous tes condisciples.

Le Gabonais Ngoyo Moussavou, autre perle de la promotion, actuel ambassadeur de son pays en France depuis deux ans, t’avait félicité publiquement. Comment va-t-il ressentir ta perte cruelle? Assurément, il sera choqué et dira certainement «cette belle plume n’écrira plus».

Monument de modestie et d’humilité- principales qualités du journaliste- ta grande expérience professionnelle l’expliquait certainement, tu avais les mots justes pour expliquer et donner conseils aux plus jeunes et néophytes comme moi et tant d’autres qui côtoyaient de talentueux professionnels aguerris, comme toi et Ngoyo.

Vous étiez notre fierté, nous de l’option Presse Ecrite de la 15è promotion. Et vous l’aviez prouvé au journal provincial, «Nord Croix Magazine» de Lille (France) en juin-juillet 1987 lors de notre stage dans ce journal qui accueillait pour la première fois des journalistes africains. Son directeur d’alors, un ancien de la prestigieuse école de journalisme de Lille, Jean-Claude Brancart, lui, qui, au départ, était sceptique, avait déclaré, lors de la remise des attestations, qu’il s’engageait à renouveler l’expérience.

J’allais oublier d’évoquer tes belles prises de vues au Canada, dont certaines avaient été publiées par «La Presse», l’un des plus grands quotidiens canadiens.

Les Guinéens de ta génération, notamment les amoureux du ballon, te rendront hommage grâce à tes reportages vivants sur différents stades d’Afrique sur les prouesses du mythique Hafia Football Club.

Les souvenirs, en ce moment de douleur et de tristesse, ne cessent de flotter dans ma tête. Mais je vais juste rappeler un dernier. Te rappelles-tu du voyage in cursus au Canada, aux Etats-Unis et en France en 1987? Oui, mon frère. Mais tu ne reconnais pas que tu faisais partie de ceux qui avaient laissé tous leurs sous à Philadelphia Hôtel où durant le séjour ils avaient passé tout leur temps à regarder des chaines privées de télévision, notamment la nuit. La bagarre avait éclaté dans le hall avant le départ sur Washington où tu m’avais confié que tu avais été émerveillé par la visite du musée Memorial Abraham Lincoln.

Doyen Fass, dors en paix. La flamme de notre fraternité s’éteindra quand mon tour viendra de te rejoindre dans le royaume du silence. Comme t’ont précédé notre directeur, Babacar Sine, nos professeurs Amadou Kamir Doumbia du Mali, Oumar Diagne et Mbaye Guéye du Sénégal.

Aly Coulibaly, Correspondant de Panapress en Guinée (2012)