Depuis la dénonciation de la falsification de la constitution du 22 mars par Maître Pepé Antoine Lamah et d’autres magistrats, de nombreux Guinéens se demandent quelle loi fondamentale respecter.
Dans ce tollé, l’Ordre des avocats a signifié que la falsification de constitution constatée relèverait de la « délinquance juridique », avant de demander le retrait du document dans lequel, il voit une « trahison du peuple » ou du moins de ceux qui avaient voté.
Ainsi le patron de l’appareil judiciaire, dans le but d’apporter des éclaircissements, avait laissé entendre que son cabinet était entrain d’étudier le dossier, et qu’une réponse sera donnée pour situer le peuple.
Après plusieurs jours, le ministre de la justice qui était attendu pour donner des explications, a plutôt fait des injonctions, à l’occasion d’une conférence de presse organisée à cet effet : «  C’est  le texte publié au Journal officiel (le 14 avril 2020) qui est applicable et opposable à tous ».
Et de poursuivre dans sa logique de faire admettre que comme elle a été promulguée, le peuple serait condamné à la respecter en tant que telle : «  Notre rencontre de ce jour vise à vous entretenir sur le débat  en cours relatif à la Constitution du 22 mars 2020. A cet égard, il y a lieu de rappeler que le texte en question a fait l’objet de plusieurs consultations et autant d’amendements pour prendre en compte toutes les préoccupations de l’ensemble des Guinéens. C’est suite à tout cela qu’après l’avis de la Cour constitutionnelle, le projet a été soumis au référendum et adopté le 22 mars 2020 avec la proclamation de la victoire du OUI par la CENI et confirmé par l’arrêt AE007 du 03 avril 2020 qui l’a proclamé comme étant la Constitution de la République de Guinée. »
En réaction à l’intervention du ministre de la justice, le barreau guinéen à travers Maître Traoré, trouve le ministre Fofana, trop léger dans son argumentaire et, lui rappelle qu’il ne peut pas imposer une constitution au peuple, car celle issue de la falsification n’est pas l’émanation du peuple de Guinée : «  En ce qui concerne l’intervention de M. le ministre de la justice, hier, je suis étonné de la légèreté, de la facilité avec laquelle M. le ministre pense qu’on peut régler cette affaire. Sur la question qui est posée, c’est un véritable problème qu’on ne peut pas régler avec autant de facilité. Nous avons là une constitution qu’on veut nous imposer, qui n’est pas celle que le peuple a adoptée. Il y a là un problème de légitimité « .
Il poursuit son intervention pour  signifier que la sortie médiatique du ministre est décevante donc loin d’être une réponse aux attentes des citoyens : »Vous savez, il avait fait une première sortie qui était pleine d’espoir parce qu’il avait dit qu’il allait mettre en place une commission pour vérifier, afin de voir d’où vient cette erreur et que par la suite l’opinion serait largement informée. Donc, autant cette intervention était rassurante, autant celle d’hier est décevante « .
Pour Bah Oury, nous assistons à une violation de l’État de droit. Selon lui le ministre de la justice ne peut pas s’arroger le droit de définir quel texte sera considéré comme la constitution. Il va plus  loin car, selon lui, la Guinée se trouverait dans un vide juridique avec cette forfaiture juridique : « Que le ministre de la Justice se donne le pouvoir de définir quel est le texte qui sera considéré comme la Constitution de la République de Guinée, prouve que nous sortons totalement du cadre de l’Etat de droit parce que cela veut dire que c’est l’impunité qui l’emporte au détriment du respect scrupuleux des fondamentaux du droit. Ils ont proposé un texte de manière très controversée et dans des conditions de troubles, ils ont organisé un semblant de référendum et je rappelle que le texte proposé a été publié dans le journal officiel, ce qui lui donne un caractère très officiel. C’est ce document qui a été proposé au référendum de 22 mars. Après le 22 mars, ils nous sortent un autre texte promulgué qui n’a rien à voir dans le fond et dans la forme avec le texte initial. Au point de vue du droit, cela veut dire que c’est un crime contre la confiance publique qui vient d’être commis. Donc, un crime ne peut pas servir d’éléments pour imposer un texte qui n’est pas du tout approuvé et ni présenté à la population quel que soit notre point de vue par rapport au référendum du 22 mars. Au point de vue du droit, indépendamment de ma prise de position, la Guinée se retrouve aujourd’hui dans un vide Constitutionnel. La déclaration du ministre de la Justice ne peut pas, par un simple communiqué, octroyer une Constitution à la République de Guinée alors qu’il y a toute une batterie de procédures législatives et juridiques pour consacrer une loi fondamentale dans un État de droit » a déclaré l’ex ministre de la réconciliation nationale.
Pourquoi cette falsification ? À qui profiterait- elle ? La constitution du 22 mars est- elle véritablement l’émanation du peuple après cette « délinquance juridique « ?
Ces questions méritent des réponses pour situer les Guinéens et éviter à la Guinée une impasse juridique. Il est urgent de sortir le pays de cet imbroglio.
Bokhidi KENDE pour  GCO
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